Questions-Réponses avec Bénédicte Caron
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Questions-Réponses avec Bénédicte Caron

Bénédicte Caron, vice-présidente de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) en charge des affaires économiques, revient sur les conséquences de la crise sanitaire pour les PME, ainsi que sur les mesures destinées à les accompagner. Entretien.

L’accompagnement des PME françaises est aujourd’hui un enjeu majeur de la relance économique

Quelles conséquences le confinement et la crise sanitaire ont-ils eues sur les PME françaises ?

Les premières conséquences de la crise ont bien sûr été économiques. Toutefois, toutes les PME n’ont pas été touchées de la même façon, selon leur secteur d’activité et leur localisation géographique. À titre d’exemple, si l’industrie agroalimentaire et la grande distribution ont pu connaître, dans une grande majorité, un surcroît d’activité pendant le confinement, il n’en est pas forcément de même pour les magasins des centres-villes étudiants, qui ont été désertés pendant deux mois. De même, à l’heure de la reprise dans le secteur du tourisme, l’été a pu être profitable pour la Bretagne par exemple, où les campings, les restaurants, les hôtels ont affiché complet, permettant de rattraper les pertes du printemps. À Paris, en revanche, déserté par les touristes étrangers, le scénario n’est pas le même. Certains hôtels n’ont pas rouvert leurs portes depuis le 16 mars ! Et d’autres secteurs sont toujours dans le rouge, comme ceux du textile et de l’habillement ou encore les pressings, qui ont fortement pâti de l’annulation des mariages, baptêmes, prestations de traiteurs ou encore manifestations sportives.
Et n’oublions pas les conséquences humaines. En dehors de tout problème financier, la pandémie a généré un stress quotidien, très mal vécu par la majorité des chefs d’entreprises, y compris pour ceux dont l’activité n’a pas été impactée.

 

Quel rôle la CPME a-t-elle joué auprès de ces entreprises ?

Dans ce contexte, la CPME a joué un rôle déterminant de relai, à double sens. Pendant le confinement, nous avons travaillé quotidiennement avec les ministères de l’Économie et du Travail. Nous avons fait remonter toutes les problématiques rencontrées par les chefs d’entreprise, et fait de nombreuses propositions : demande d’annulation ou de report des paiements des loyers, report des prélèvements de charges… L’État a entendu les PME françaises, et presque toutes les mesures demandées ont été mises en place.
Du côté des entreprises, nous avons joué un rôle d’informateur auprès des CPME territoriales, qui ont relayé nos messages auprès des chefs d’entreprise, adhérents et non adhérents. Nous avons ainsi pu répondre à toutes les questions qui se sont posées, notamment sur la mise en place du chômage partiel, qui a généré beaucoup d’inquiétude.

 

Le visage des PME, leur fonctionnement, leur organisation, seront-ils impactés sur le long terme par cette crise inédite ?

Il est évident que cette crise va laisser – et laisse déjà ! – des traces. Les modes de consommation vont évoluer (en favorisant le made in France, le bio, le commerce équitable…), tout comme le mode de fonctionnement des entreprises. Je pense notamment au digital. Les entreprises ont compris qu’il fallait absolument passer le cap. Un exemple très précis : celles qui dépendaient de La Poste pour envoyer leur courrier pendant le confinement ont très vite rencontré des problèmes… Un autre exemple est celui de la rationalisation des réunions. Les Français passent beaucoup de temps en réunion. Utiliser des outils numériques rien que pour la moitié d’entre elles permet de gagner en efficacité. Mais cela diminue aussi le nombre de déplacements et de nuits d’hôtels achetés auprès des professionnels du voyage et du tourisme…

 

Comment les chefs d’entreprise anticipent-ils les mois à venir ? Quels sont leurs besoins à court et moyen termes ?

Il est aujourd’hui très difficile pour les chefs d’entreprise d’anticiper l’avenir, tout simplement parce que personne ne sait de quoi sera fait demain, avec une pandémie qui semble repartir à la hausse. Sans oublier les reports de charges qui arrivent à échéance, les prêts qu’il va falloir rembourser… Dans ce contexte, leur réflexe est donc d’économiser plutôt que d’investir. Or, nous avons besoin que les consommateurs regagnent en confiance ! Les entreprises ont besoin de trésorerie, donc elles doivent relancer leur activité. Et tout le monde doit reprendre le chemin du travail ; il y a encore trop de gens qui n’ont pas repris, voire qui sont en télétravail mais sans connexion Internet ! Tant que des maillons de la chaîne seront toujours manquants, l’activité ne pourra pas fonctionner normalement.

 

Vous avez dévoilé le 4 juin dernier un plan de soutien et d’investissement en faveur des TPE, PME, artisans, commerçants et indépendants. Que prévoit-il ?

Nous avons travaillé en concertation avec nos adhérents, qui ont fait remonter beaucoup de besoins. Ce document contient 109 propositions, articulées autour de grands thèmes dont l’objectif est que chaque entreprise qui avait un modèle économique viable avant la crise du covid-19 soit de nouveau bénéficiaire le plus rapidement possible. Il s’agit d’accélérer le redémarrage économique. Cela passe notamment par un travail sur l’ancrage territorial et la promotion du made in France ; les entreprises ont en effet souffert du manque de pièces détachées et de consommables habituellement achetés à l’autre bout du monde… Cela doit changer. Cela passe également par la transition écologique, qui doit devenir un outil de développement durable économiquement pour les entreprises. Enfin, il faut accompagner ces changements avec des mesures sociales, pour que le coût français de fabrication devienne compétitif avec celui pratiqué en Chine par exemple.

 

Quel rôle les fonds d’investissement, en tant qu’investisseurs à moyen terme, ont-ils à jouer auprès des PME ?

Aujourd’hui, 99 % du tissu économique français est constitué de PME et TPE. Si celles-ci ne redémarrent pas, c’est la France qui ne redémarrera pas ! Elles doivent donc être accompagnées, et les fonds d’investissement ont un rôle à jouer dans le renforcement de leur capital et l’accompagnement de leur croissance. Le fait d’être accompagné par un fonds d’investissement oblige le chef d’entreprise à prendre le temps de faire un retour sur son projet, de définir ses objectifs. Tout simplement pour être en mesure, dans un premier temps, d’expliquer sa vision au fonds. Il peut ensuite adopter sereinement une stratégie. Et dans ce cadre, la CPME oriente les entreprises qui cherchent à croître vite (et parfois trop vite pour être suivies par les banques) vers des fonds et les opportunités qu’ils offrent.
C’est un travail main dans la main qu’il faut mener.

C’est rien de moins que l’économie de toute la France qui est en jeu !

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